août 03 2009
Tracasseries douanières dans la Savoie d’avant l’Annexion
De nombreux voyageurs ont fait état des tracasseries administratives auxquelles ils étaient soumis en entrant dans la Savoie dite de la Restauration sarde, entre 1815 et 1860. L’écrivain genevois Rodolphe Töpffer (1799-1846), par exemple, raconte qu’étant, un soir, dans une auberge de Bonneville, il est dérangé en plein repas par des carabiniers qui lui demandent instamment son passeport – ainsi que celui des enfants qui l’accompagnent : car, directeur d’école, il voyageait en compagnie de ses élèves.
Plus significatif encore, l’écrivain dauphinois Alfred de Bougy (1814-1874), passant (en 1844) par Douvaine pour aller vers Thonon, est arrêté par des douaniers sardes qui fouillent ses affaires pour scruter notamment les « livres interdits », et les confisquer au besoin. De fait, la frontière n’était pas seulement économique. Les livres à tendance libérale, « anti-catholique » et révolutionnaire venaient de France, parfois de Suisse, et l’administration du Roi les empêchait soigneusement d’entrer en Savoie, où la population était tranquille mais aussi très surveillée. La censure était forte. Les prêtres extrêmement puissants, comme Stendhal lui-même le rapporta en 1837 : nous en avons parlé.
Alfred de Bougy ajoute que, à la sortie de Douvaine, les carabiniers visèrent son passeport en italien, et cela lui fait s’écrier que « les Savoyards n’ont même pas un gouvernement qui parle leur langue maternelle ! » Pourtant, à Turin, on parlait couramment le français, qui était langue officielle à côté de l’italien, et les actes administratifs devaient être traduits avant d’arriver dans le Duché. Mais la domination des Piémontais se faisait de plus en plus sentir, et la langue des visas le montre indéniablement.
Le poids de l’administration « sarde » était donc important, et on ne peut sans doute pas parler, dans la Savoie de cette époque, de sentiment général de liberté.
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