juil 20 2009
Perceptions de la France dans la Savoie de 1860
On s’imagine volontiers qu’en 1860, les Savoyards croyaient aveuglément aux promesses de Napoléon III et qu’ils se pensaient accueillis à bras ouverts par la “Mère Patrie”. Mais un document existe, qui montre bien autre chose : il s’agit de la pièce de théâtre satirique du cousin d’Antony Dessaix, Joseph Dessaix (1817-1870), intitulée La Savoie à la recherche du Mont-Blanc.
Joseph Dessaix, rappelons-le, est le créateur de l’hymne dit des Allobroges, en fait de la Liberté, qui terminait justement la représentation de cette pièce.
Le titre de celle-ci traduit en tout cas l’importance que le mont Blanc avait prise dans le symbolisme local. Or, il faut avouer que le premier à l’avoir utilisé dans la nomenclature administrative est Napoléon. On se souvient que Joseph Dessaix était le neveu d’un célèbre général de l’Empire (qui avait gouverné Berlin et y avait laissé de bons souvenirs, selon Antony Dessaix).
Il n’y avait donc pas d’hostilité vis à vis de la France, chez Dessaix, mais il n’y avait pas d’illusion non plus. Car dans sa pièce, un Français provoque l’indignation en laissant entendre que l’Annexion permettra à la France de civiliser les Savoyards, de les rendre “polis et honnêtes”. Cette indignation est exprimée sur la scène de façon populaire, et montre que l’on ne se leurrait pas sur le regard que l’on portait à Paris sur les Savoyards.
Cependant, il faut rappeler que la représentation de cette satire (également dirigée contre Berne et Zurich, soit dit en passant) a été interdite par l’administration de Turin même. Elle n’a pu être publiée qu’à Genève, justement en 1860. Le désir de Turin de céder la Savoie à la France l’encourageait à ne pas permettre l’expression de cette sorte de sentiments. Les relations diplomatiques avec Paris auraient pu en souffrir !
Rémi Mogenet
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