sept 14 2009

La patrie de Thonon au temps de l’Annexion

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charles-albert-de-savoie-roi-de-sardaigneOn sait, de l’écrivain thononais Maurice-Marie Dantand, qu’il dut naître vers 1827, qu’il fit des études de Théologie à Turin, et qu’il fut huissier préposé aux poids et mesures.

Son œuvre est constituée de deux ouvrages principaux : le plus connu est le Gardo, recueil de légendes thononaises très imaginatives, souvent épiques, et le plus volumineux est l’Olympe disparu, une sorte d’épopée prophétique et visionnaire en trois tomes évoquant de nombreux sujets différents, au sein desquels se mêlent, pour l’essentiel, des souvenirs de la Bible, de Virgile et Ovide, du folklore thononais et de sa vie personnelle. On y trouve même une sorte de science-fiction, puisqu’il dit que, guidé par un ange, il a visité, en esprit, d’autres planètes !

Mais, quoiqu’il l’eût vécue, il fait très peu allusion à l’Annexion. Il ne s’y intéressait guère, visiblement. Pour lui, la patrie, c’était Thonon et le Chablais. Ses souvenirs militaires le renvoyaient aux guerres du roi Charles-Albert contre l’Autriche. Il n’est jamais, semble-t-il, allé à Paris ; il évoque plutôt Genève – mais en critiquant la façon dont les Genevois tournent en risée les princes de Savoie, lors des cérémonies de l’Escalade.

Il était généralement hostile à ce qu’on appelle le progrès, estimant qu’il dénaturait la société sur le plan moral, et il a essayé de prouver que le pain blanc était mauvais pour les dents. Or, dans le même esprit de récrimination contre les nouveautés, il s’est plaint que la France ait ajouté « les Bains » au nom de Thonon : il trouvait cela ridicule et impropre. La dignité de Thonon, qui n’avait jamais été une station balnéaire, en était à ses yeux diminuée.

Car il regardait Thonon comme étant la vraie capitale du Léman, la cité lémanique que les anges (disait-il explicitement) venaient visiter de préférence – peut-être même la seule où ils aimaient venir ! Et c’est tout ce qui comptait, de son point de vue. Était-ce un souvenir obscur du temps où Amédée VIII, depuis son château de Ripaille, dirigeait tout le pourtour lémanique ? On ne sait. Mais pour Dantand, la patrie de Savoie, voire du Chablais, se suffisait à elle-même. Seule la foi catholique lui importait peut-être davantage encore.

Et il est en tout cas clair que le rôle touristique que Paris voulait faire jouer à Thonon (et à la Savoie tout entière) lui déplaisait : il faisait au fond de sa patrie un temple – où les perspectives économiques nouvelles installaient bien trop de marchands ! Or, issu d’une vieille famille thononaise, il est aussi représentatif d’un certain courant de pensée qui a toujours existé dans la capitale du Chablais.

 

Rémi Mogenet.

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